Le Canada et le Québec ont longtemps été des destinations d’espoir pour les migrants africains en quête de stabilité, d’éducation et d’opportunités. Cependant, les récents changements politiques au Canada, combinés à la mise en place d’un nouveau décret migratoire aux États-Unis, redéfinissent les flux migratoires et posent des défis majeurs aux immigrés africains. Avec une baisse projetée de la population québécoise et une réduction des cibles d’immigration au niveau national, l’avenir des migrants africains au Canada devient de plus en plus complexe.
La population du Québec devrait diminuer de 80 000 habitants d’ici 2030, avec une baisse de 4,5 % dans la région de Montréal au cours des prochaines décennies, selon l’Institut de la statistique du Québec. Les principaux facteurs de ce déclin démographique incluent de faibles taux de natalité, des politiques d’immigration restrictives et des disparités régionales.
Pour les migrants africains, qui représentent une part importante de la population immigrée au Québec, ces changements ont des répercussions importantes :
Réduction des Cibles d’Immigration
Le Québec s’aligne sur la décision du gouvernement fédéral de réduire les cibles d’immigration de 21 % entre 2025 et 2027. Le nombre de résidents permanents sera limité à 395 000 en 2025, 380 000 en 2026 et 365 000 en 2027, tandis que les permis pour résidents temporaires seront plafonnés à 300 000 en 2025.
Cette réduction pourrait affecter de manière disproportionnée les pays africains comme l’Algérie, le Maroc et le Sénégal, qui ont historiquement contribué un grand nombre de travailleurs qualifiés et d’étudiants au Québec.
Déclin de Montréal
La région de Montréal, qui abrite une communauté africaine dynamique, devrait voir une baisse démographique d’ici 2051. Cela pourrait nuire à l’identité multiculturelle et à la croissance économique de la ville, historiquement stimulées par l’immigration.
Conséquences Économiques et Sociales
Les secteurs comme la santé et l’éducation, qui dépendent fortement des migrants africains, pourraient faire face à des pénuries de main-d’œuvre alors que les flux migratoires diminuent. Cela est particulièrement préoccupant pour une population québécoise vieillissante.
Le nouveau décret migratoire élargi des États-Unis cible 19 pays, dont 8 nations africaines : le Tchad, l’Érythrée, la Libye, la Somalie, le Soudan, le Yémen, la République du Congo et la Guinée équatoriale. Pour les citoyens de ces pays, l’entrée aux États-Unis est désormais soit totalement interdite, soit soumise à des restrictions strictes.
Principaux Impacts sur l’Immigration Africaine au Canada :
Augmentation des Demandes d’Asile
Les migrants africains interdits d’entrée aux États-Unis pourraient se tourner vers le Canada comme alternative. Cependant, la loi Loi sur les frontières solides, introduite pour renforcer le système d’immigration canadien, impose de nouvelles restrictions complexes, telles que :
Les demandeurs d’asile doivent déposer leur demande dans l’année suivant leur arrivée au Canada.
Les traversées irrégulières de la frontière américaine doivent être suivies d’une demande d’asile dans les 14 jours suivant l’entrée au Canada.
Ces règles affectent de manière disproportionnée les réfugiés africains fuyant les conflits et les persécutions, car beaucoup passent de longues périodes dans des pays de transit avant d’atteindre le Canada.
Responsabilités Humanitaires
Les groupes de défense exhortent le Canada à augmenter les places de réinstallation pour les populations vulnérables des pays africains comme le Soudan, l’Érythrée et Haïti. Cependant, avec des cibles d’immigration réduites et des ressources limitées, la capacité du Canada à répondre à ces besoins reste incertaine.
Changement dans la Migration de Travailleurs Qualifiés
Les programmes inclusifs du Canada, tels que Entrée Express et le regroupement familial, restent ouverts aux candidats de toutes nationalités. Cela positionne le Canada comme une destination attrayante pour les travailleurs qualifiés et les étudiants africains exclus par le décret américain. Cependant, la réduction des permis et la concurrence accrue pourraient limiter l’accès pour les migrants des pays comme le Nigeria et le Kenya.
Historiquement, les étudiants et travailleurs africains ont joué un rôle clé dans l’économie et le système éducatif du Canada. Cependant, les récents changements politiques posent des obstacles :
Restrictions pour les Résidents Temporaires
Avec les permis temporaires plafonnés à 300 000 en 2025, les étudiants et travailleurs africains pourraient avoir plus de difficultés à obtenir des visas et à passer à la résidence permanente.
Cela pourrait affecter des industries comme la technologie et la santé, qui dépendent des migrants africains pour combler les pénuries de main-d’œuvre.
Défis d’Intégration
Bien que le Québec propose des initiatives telles que les services de garde subventionnés pour les enfants de travailleurs migrants, les systèmes de soutien plus larges pourraient être insuffisants pour compenser l’impact des réductions des flux migratoires.
Le décret migratoire américain risque de mettre à rude épreuve l’Accord sur les tiers pays sûrs entre le Canada et les États-Unis, qui exige que les demandeurs d’asile déposent leur demande dans le premier pays sûr qu’ils atteignent. Les migrants africains rejetés par les États-Unis pourraient tenter des traversées irrégulières vers le Canada, compliquant davantage la gestion des frontières et relançant les défis juridiques liés à cet accord.
Malgré ces défis, le Canada et le Québec ont une occasion unique de réaffirmer leur engagement envers la diversité et l’inclusion :
Augmenter les Programmes de Réinstallation
Augmenter les places de réinstallation pour les populations vulnérables africaines, en particulier les réfugiés soudanais et érythréens, pourrait renforcer le leadership humanitaire du Canada.
Répondre aux Pénuries de Main-d’Œuvre
Revoir les cibles d’immigration pour attirer des travailleurs africains qualifiés pourrait aider à combler les lacunes critiques du marché du travail, en particulier au Québec.
Faciliter l’Intégration
Investir dans la formation linguistique, le logement et le soutien à l’emploi pour les migrants africains pourrait améliorer leur intégration et leurs contributions à long terme à la société canadienne.
La combinaison de politiques restrictives au Canada et du décret migratoire américain redéfinit les flux migratoires africains. Bien que le Canada reste plus accueillant que son voisin du Sud, les cibles d’immigration réduites et les règles d’asile plus strictes risquent de limiter les opportunités pour les migrants africains.
Pour maintenir sa réputation de nation inclusive, le Canada doit équilibrer ses intérêts nationaux avec son engagement envers l’équité et la responsabilité humanitaire. En élargissant les programmes de réinstallation, en répondant aux besoins du marché du travail et en soutenant l’intégration des migrants, le Québec et le Canada peuvent continuer à être des destinations d’espoir et d’opportunités pour les migrants africains.